Feræ
Au début de l’année 2020, j’ai commencé à me rendre régulièrement dans des lieux de soins pour la faune sauvage. À proximité du tourbillon de la ville, mais aussi dans un environnement moins urbain au moment de préparer au retour à la vie sauvage.
Dans ces centres, les gestes se répètent et deviennent rituels, au fil des heures qui bien souvent s’oublient. Vétérinaire, soigneurs, bénévoles, étudiants s’y succèdent. Leurs visages veillent. Leurs mains nourrissent, rééduquent, pansent et nettoient.
Au contact des corps blessés s’ouvre l’espace d’un face-à-face avec l’altérité animale où les distances se recomposent. Dans la proximité de cette rencontre avec l’animal sauvage, les mouvements cherchent assurance et justesse selon les espèces. On y apprend à être attentif aux minces signes d’effroi de l’animal, à surveiller les abris, les linges tamisant la lumière, le silence.
Ce temps de soins qui voit se bousculer les frontières relationnelles avec l’animal non domestique se doit d’être le plus bref possible, afin de lui éviter un stress mortel, ou au contraire de trop l’imprégner de la présence humaine.
A l’heure où les espèces sauvages et leurs habitats continuent à se réduire sans cesse, des sensibilités tentent ainsi de se faire entendre et d’agir pour la faune sauvage. Comme une tentative de réparer nos liens avec le vivant.
Ces images ont été réalisées entre 2020 et 2022 dans les centres de soins de l’association Faune Alfort, le CHUV-FS (Centre Hospitalier Universitaire Vétérinaire – Faune Sauvage) en partenariat avec l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort et le CSERFS (Centre de Soins, d’Élevage et de Réhabilitation de la Faune Sauvage) à Mandres-les-Roses, ainsi qu’auprès de l’association des Rémiges Noires à Chennevières-sur-Marne.
Avec plus de sept mille accueils d’animaux par an, l’association Faune Alfort et ses partenaires gèrent la plus grande structure de soins à la faune sauvage en France. Elle fait partie du Réseau national des Centres de Soins de la Faune Sauvage en France. L’association des Rémiges Noires basée à Chennevières-sur-Marne est quant à elle spécialisée dans la prise en soins du martinet noir, oiseau aux besoins très spécifiques.
Alors que le nombre d’accueils d’animaux en détresse continue d’augmenter chaque année, l’équilibre de ces centres qui survivent grâce aux dons reste extrêmement précaire.
(EN)
For about two years, I regularly went to wildlife care centers. It is a place close to the hustle and bustle of the city. It is also deployed in a less urban environment to help prepare for an animal’s return to the wild.
Here, over hours which are often forgotten, gestures are repeated and become recurring rituals. Veterinarians, trainers, volunteers, and students follow one another. Their faces watch. Their hands nourish, educate, heal, and cleanse.
In contact with injured bodies, the space opens up for a face-to-face encounter with an animal ‘otherness’, where distances are recomposed and sometimes entirely removed. In the close proximity of this encounter with the wild animal, movements seek assurance and accuracy depending on the species. We learn to be attentive to the slight signs of an animal’s fear, watching the shelters, the linen sifting the light, the silence.
This time of care, which sees the relational boundaries with the non-domestic animal jostle and change, must be as brief as possible in order to avoid fatal stress, or, on the contrary, to impregnate the animal with too much of the human presence, a term called imprinting.
At a time when wild species and their habitats continue to constantly shrink, sensitives are trying to make themselves heard and act for wildlife. An attempt to repair our links with the living.
These images were taken between 2020 and 2022 in the care centers of the « Faune Alfort » association (CHUV-FS ans CSERFS), and with the association of « Rémiges Noires », near Paris.
With more than seven thousand animal receptions per year, the «Faune Alfort» association, which is associated with the Alfort University Veterinary Hospital for Wildlife CHUV-FS, has become the leading care centre in France for a number of wild species. It is part of the National Network of Wildlife Care Centres. The « Remiges Noires » Association specializes in the care of black swift. While the received number of animals in distress continues to increase each year, the balance of these centres surviving thanks to donations remains extremely precarious.